Le décor est âpre, froid, rugueux, comme frappé du sceau de l’inhospitalité. Qu’il s’agisse de la nature dans laquelle le protagoniste souhaite trouver le calme et l’inspiration ou dans le portrait des antipathiques habitants de cette contrée reculée, tout semble menaçant. Dans cette ambiance typique du « rural noir », le lecteur se retrouve enveloppé d’un brouillard épais et mystérieux qui s’érige en une barrière l’isolant de la civilisation. En effet, bien que se déroulant de nos jours, l’ambiance de cette intrigue est si austère que la sensation d’être plongé dans une autre époque ne nous quitte pas et on en perd un peu ses repères. Franck Bouysse se plaît donc dans ce dernier ouvrage à recréer cette ambiance signature, si caractéristique de son oeuvre, façonnée par cette écriture oscillant entre poésie et conte pour laisser planer le mystère. Alternant les points de vue, ceux de Caleb et d’Harry, le romancier lie les personnages et exhume peu à peu les secrets bien enfouis, par cette si secrète et taiseuse communauté. Pourtant, le mystère tant cultivé par l’écrivain, cet effet d’attente, de ménagement du lecteur jusqu’à la révélation finale m’ont paru tellement vains ! Je suis au regret de dire que je me suis fermement ennuyée et que le souvenir de cette lecture restera lui aussi au fond du puits. Les personnages sont détestables, tous rustauds et ne s’exprimant qu’au travers de paroles nébuleuses visant à entretenir ce mystère angoissant, à maintenir le nouveau venu loin de ce qu’il pourrait découvrir. L’antipathie que l’on éprouve pour ces habitants du Bélier est telle que j’ai eu hâte d’en finir et de les laisser dans leur trou à partir de la moitié du livre. Non, vraiment, Franck Bouysse n’aura été pour moi que l’écrivain d’un coup de coeur Né d’aucune femme, et, après avoir connu une première déception avec Les buveurs de vent, il est certain que je m’arrêterai là.